Le syndrome de Tako Tsubo est une maladie du muscle cardiaque caractérisée par un dysfonctionnement transitoire du ventricule gauche. Depuis sa première description au Japon en 1990, le syndrome de Tako Tsubo a acquis une reconnaissance mondiale. Toutefois, après 30 ans d'efforts considérables pour mieux comprendre cette maladie, les connaissances actuelles restent limitées.
Définition du syndrome du cœur brisé
Le syndrome de Tako Tsubo est une maladie du muscle cardiaque caractérisée par un dysfonctionnement transitoire du ventricule gauche.
Cette cardiomyopathie tire son nom du japonais « piège à pieuvre », en raison de la forme prise par le ventricule gauche dans la plupart des cas : un ballonnement au sommet du cœur et un rétrécissement à sa base. Le syndrome de Takotsubo porte également les noms de « syndrome du cœur brisé » et « syndrome de ballooning apical ».
Qui est concerné ?
Le syndrome de Takotsubo représente environ 1 à 3 % de l'ensemble des patients au niveau mondial. D'après la littérature, environ 90 % des patients atteints du syndrome sont des femmes dont l'âge est compris entre 67 et 70 ans. Les femmes de plus de 55 ans ont un risque cinq fois plus élevé de développer la maladie que les femmes de moins de 55 ans et un risque dix fois plus élevé que les hommes.
Les symptômes du syndrome de Tako Tsubo
Les symptômes les plus courants du syndrome de Tako Tsubo sont :
- Des douleurs thoraciques aiguës ;
- Une dyspnée : difficulté ou gêne respiratoire ;
- Une syncope : perte de connaissance brutale.
La manifestation clinique du syndrome de Takotsubo induit par un stress physique sévère peut être dominée par la manifestation de la maladie aiguë sous-jacente. Chez les patients victimes d'un accident vasculaire cérébral ischémique ou d'une crise d'épilepsie, le syndrome de Takotsubo est moins souvent accompagné de douleurs thoraciques. En revanche, les patients présentant des facteurs de stress émotionnel ont une prévalence plus élevée de douleurs thoraciques et de palpitations.
Il est important de noter qu'un sous-ensemble de patients atteints de syndrome de Takotsubo peut présenter des symptômes découlant de ses complications :
- Une insuffisance cardiaque ;
- Un œdème pulmonaire ;
- Un accident vasculaire cérébral ;
- Un choc cardiogénique : défaillance de la pompe cardiaque ;
- Un arrêt cardiaque ;
Diagnostic du syndrome de Takotsubo
Le diagnostic du syndrome de Takotsubo est souvent difficile à distinguer de l'infarctus du myocarde aigu. Cependant, chez certains patients, il peut être diagnostiqué de manière fortuite par l’intermédiaire de modifications de l'électrocardiogramme (ECG) ou une élévation soudaine des biomarqueurs cardiaques – des produits libérés dans le sang lorsque le cœur est endommagé.
La coronarographie avec ventriculographie gauche – radiographie qualitative et quantitative de la fonction ventriculaire gauche – est considérée comme l'outil de diagnostic de référence pour exclure ou confirmer la maladie.
Un outil, appelé score InterTAK, permet aussi d’orienter de façon rapide un diagnostic du syndrome de Takotsubo. Noté sur 100 points, le score InterTAK repose sur sept paramètres :
- Le sexe féminin (25 points) ;
- L’existence d'un stress psychologique (24 points) ;
- L’existence d'un stress physique (13 points) ;
- L’absence de dépression du segment ST sur l’électrocardiogramme (12 points) ;
- Les antécédents psychiatriques (11 points) ;
- Les antécédents neurologiques (9 points) ;
- L’allongement de l'intervalle QT sur l’électrocardiogramme (6 points).
Un score supérieur à 70 est associé à une probabilité de la maladie égale à 90 %.
Causes du syndrome du coeur brisé
La plupart des syndromes de Takotsubo sont déclenchés par des événements stressants. Les déclencheurs physiques sont plus courants que les facteurs de stress émotionnel. Par ailleurs, les patients de sexe masculin sont plus souvent affectés par un événement stressant physique, tandis que chez les femmes, un déclencheur émotionnel est plus fréquemment observé. Enfin, des cas se produisent aussi en l'absence d'un facteur de stress évident.
Les déclencheurs physiques
Parmi les déclencheurs physiques, on recense :
- Les activités physiques : jardinage intensif ou sport ;
- Différentes conditions médicales ou situations accidentelles : insuffisance respiratoire aiguë (asthme, maladie pulmonaire obstructive chronique en phase terminale), pancréatite, cholécystite (inflammation de la vésicule biliaire), pneumothorax, lésions traumatiques, septicémie, chimiothérapie, radiothérapie, grossesse, césarienne, foudre, quasi-noyade, hypothermie, cocaïne, sevrage d'alcool ou d'opiacés, intoxication au monoxyde de carbone, etc.
- Certains médicaments, notamment les tests de stress à la dobutamine, les tests électrophysiologiques (isoproterenol ou épinéphrine) et les bêta-agonistes pour l'asthme ou les maladies pulmonaires obstructives chroniques ;
- L'obstruction aiguë des artères coronaires ;
- Les affections du système nerveux : accident vasculaire cérébral, traumatisme crânien, hémorragie intracérébrale ou convulsions ;
Les déclencheurs psychologiques
Parmi les déclencheurs psychologiques, on trouve :
- Le deuil : la mort d'un membre de la famille, d'un ami ou d'un animal de compagnie ;
- Les conflits interpersonnels : un divorce ou une séparation familiale ;
- La peur et la panique : un vol, une agression ou une prise de parole en public ;
- La colère : une dispute avec un membre de la famille ou un propriétaire ;
- L'anxiété : une maladie personnelle, une garde d'enfants ou une situation sans domicile fixe ;
- Des problèmes financiers ou professionnels : des pertes au jeu, une faillite d'entreprise ou une perte d'emploi ;
- Autres : poursuites judiciaires, infidélité, incarcération d'un membre de la famille, défaite dans une action en justice, etc. ;
- Les catastrophes naturelles telles que les tremblements de terre et les inondations.
A noter enfin que les déclencheurs émotionnels du syndrome ne sont pas toujours négatifs : des événements émotionnels positifs peuvent aussi provoquer la maladie : une fête d'anniversaire surprise, le fait de gagner un jackpot et un entretien d'embauche positif, etc. Cette entité a été décrite comme le « syndrome du cœur heureux ».
Traitements du syndrome de Takotsubo
Après un premier cas le syndrome de Takotsubo, les patients sont exposés à un risque de récidive, même des années après. Certaines substances semblent montrer une amélioration de la survie à un an et une diminution de ce taux de récidive :
- Les inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC) : ils inhibent la conversion de l’angiotensine I en angiotensine II – une enzyme qui cause le resserrement des vaisseaux sanguins – et augmentent les concentrations de bradykinine, une enzyme aux effets vasodilatateurs ;
- Les antagonistes des récepteurs à l'angiotensine II (ARA II) : ils bloquent l'action de l’enzyme éponyme.
- Un antiagrégant plaquettaire (AAP) peut être envisagé au cas par cas après l'hospitalisation en cas de dysfonctionnement sévère de la fonction ventriculaire gauche associé à un ballonnement apical persistant.
Le rôle potentiel de l'excès de catécholamines – des composés organiques synthétisés à partir de la tyrosine et jouant le rôle d'hormone ou de neurotransmetteur et dont les plus courantes sont l'adrénaline, la noradrénaline et la dopamine – dans la survenue de la cardiomyopathie de Takotsubo est débattu depuis longtemps, et en tant que tel, les bêta-bloquants ont été proposés comme stratégie thérapeutique. Néanmoins, ils ne semblent pas efficaces à long terme : un taux de récidive de 30 % est observé chez les patients traités à l’aide des bêta-bloquants.
D’autres pistes thérapeutiques restent à explorer, à l’image des anticoagulants, des traitements hormonaux de la ménopause ou d'une prise en charge psychothérapeutique.
Facteurs de risque
Les facteurs de risque du syndrome de Takotsubo peuvent être classés en trois grands types :
- Les facteurs hormonaux : la prépondérance frappante des femmes ménopausées suggère une influence hormonale. La baisse des niveaux d'œstrogènes après la ménopause augmente potentiellement la susceptibilité des femmes au syndrome de Takotsubo mais les données systématiques démontrant un lien clair entre les deux font défaut jusqu'à présent ;
- Les facteurs génétiques : il est possible qu'une prédisposition génétique puisse interagir avec des facteurs environnementaux pour favoriser la survenue de la maladie mais ici aussi, les études permettant de généraliser cette affirmation manquent ;
- Les troubles psychiatriques et neurologiques : une forte prévalence de troubles psychiatriques – anxiété, dépression, inhibition – et neurologiques a été reportée chez les patients atteints du syndrome de Takotsubo.